Ce que nous savons du château d'Asson nous vient essentiellement des cahiers du Chanoine J.B. Laborde qui fit une étude de sa transmission du 12ème au 20ème siècle.
Pour trouver une première trace de l'existence du château, il faut remonter à l'année 1150 pour voir qu'il appartient à un certain Goalhard de Badie et était répertorié comme Maison d'Abadie.
Cette appartenance est confirmée par le dénombrement de 1385 puis par une sentence de la Cour Majour en 1422 qui reconnaît à la Maison d'Abadie la propriété de la 8ème partie des bois et herms d'Asson.
Nous verrons que par le truchement de mariages, successions et ventes, la propriété du château va souvent changer de mains.
On doit la dénomination de “château d'Abère“ à un testament rédigé en 1501 par Bertrand de Boeil qui lègue la Maison d'Abadie à la famille d'Abère.
Celle-ci sera anoblie le 12 septembre 1524. en tant que seigneur du lieu, Pascal d'Abère se déclare propriétaire de la maison abbatiale de Minvielle, attenante à l'église St Christau; il revendique aussi le droit de prendre la jambe droite de chaque porc qui sera tué et vendu, de prélever une poignée de sel et un verre sur chaque charge qui passera à Asson.
Mais il connaitra une fin brutale en août 1569 après avoir reçu en sa maison le capitaine protestant Montgomery (celui là même qui incendia l'église St Martin); le lendemain, lui et sa fille sont assassinés par le capitaine catholique Bonasse. Puis, peut-être par confiscation des biens, le domaine échoit à la famille protestante d'Incamps qui, le 27 novembre 1662 vend l'ensemble à la famille de Gassion pour la somme de 30.000 sols tournois.
Bien plus tard, la Révolution Française passe par là et le dernier héritier en date, Jean François de Caumia Baillenx, vend la maison d'Abère et ses dépendances à Antoine Valérien Lescun, maire d'Asson pour 24.000 francs. Trente ans plus tard, le 8 mai 1837, son fils revend le tout avec une plus value (46.300 francs) à la famille d'Angosse. C'est par alliance que le château d'Abère revient à la famille de Luppé qui en est propriétaire depuis la moitié du 19ème siècle.
C'est pourquoi, aujourd'hui, les habitants d'Asson parlent du château de Luppé.
Voir les propriètaires du château d'Abères du 12éme au 20ème siècle
Histoire du château d'Abère et de ses propriétaires
L’existence de ce château est mentionnée dès le XIIème siècle.
Le nom ancien de cette maison est d’Abadie. "Goalhard de Badie d’Asson" figure comme jurat de l’un des dix-sept vics de Béarn (anciens forts de Béarn).
Au XVème siècle, les propriétaires de la maison d’Abadie sont connus grâce aux longues contestations opposant les maîtres du château aux habitants d’Asson. Ainsi, en 1483, une sentence confirme à la maison d’Abadie la propriété de la huitième partie des herms et bois d’Asson.
A la mort de Bertrand de Boeil en 1501, la maison d’Abadie est désignée désormais sous le nom d’Abère, la raison de ce changement n’est pas connue. En 1506, Bernard d’Abère est cité comme seigneur de « l’Abadie d’Assou ». C’est en faveur de ce Bernard d’Abère que la maison fut anoblie le 12 septembre 1524.
A Bernard, succéda son frère Pascal d’Abère. Celui-ci fut officier panetier de Jeanne d’Albret. Il figure avec ce titre dans les comptes de la maison de Navarre. Lors des luttes religieuses qui ensanglantèrent le Béarn en Août 1569, il reçut dans sa maison le capitaine protestant Mongonmery : le lendemain du passage de ces troupes, il fut assassiné ainsi qu’une de ses filles par les soldats du capitaine catholique Bonasse.
Après son décès, le château d’Asson et ses dépendances devinrent la propriété de Jean de Bordiu, dit le capitaine Poqueron. Est-ce un achat ? Un héritage ? Ou est-ce la Reine, selon les coutumes de ce temps, qui confisqua ces biens et les attribua à un de ses plus dévoués capitaine ? Nul ne le sait !
Ce Jean de Bordiu était un soldat de fortune qui servit fidèlement Jeanne d’Albret. Né dans le « quartier d’Artès », dans la maison qui devint château d’Angosse, il mourut vers 1590, laissant ses biens relativement conséquents, à son neveu Antoine d’Incamps, autre capitaine protestant qui joua un rôle important dans les luttes religieuses du Sud –Ouest.
Antoine d’Incamps fut gouverneur de Nay, de la vallée d’Ossau, du château de Lourdes où il fit faire d’importantes réparations. Il épousa en 1564 Annette d’Espalungue de Louvie-Juzon. De cette union sont nés plusieurs enfants dont Henry qui lui succéda dans ses charges. Par acte du 29 décembre 1588, Antoine d’Incamps obtint de Catherine de Navarre, sœur d’Henri IV et régente du Béarn, l’affièvement de la ferrarie d’Arthès. Il fut, comme son oncle Jean de Bordiu, un serviteur fidèle de la Cour de Navarre.
Suite à son décès vers 1614, son fils Henry hérita de ses biens et de ses charges. Il fut gouverneur de Nay et de la vallée d’Ossau. Vers 1612, les d’Incamps prirent le titre de baron, puis de marquis de Louvie.
Son fils, Louis d’Incamps, eut un long procès l’opposant aux communautés d’Asson et de Bruges au sujet des droits déjà revendiqués au XVème siècle par les maîtres de la maison d’Abadie. Un arrêt du Parlement de Toulouse en 1648 fut rendu en sa faveur, le maintenant dans la seigneurie directe et foncière de la huitième partie par indivis des montagnes, herms et bois. Les communautés d’Asson et de Bruges plaidèrent longtemps avec persévérance mais en vain. En 1656 puis en 1660, tous les droits revendiqués par Louis d’Incamps étaient reconnus par la justice.
Par acte du 27 novembre 1662, Messire Louis d’Incamps, marquis de Louvie, vendit à Messire Timothée de Gassion, le château et la maison noble d’Abère d’Asson avec les terres en dépendant et les droits utiles et honorifiques attachés à la dite maison pour la somme de 30 000 livres. Timothée de Gassion était le petit-fils du Président du Conseil Souverain puis du Parlement de Navarre et neveu de Jean de Gassion, Maréchal de France. Il fut admis aux Etats de Béarn pour le fief d’Abère le 7 septembre 1680 et mourut le 11 avril 1690 : il fut inhumé le 12 dans la chapelle St Jacques de l’église St Martin d’Asson. Il laissa ses biens à son frère Joseph qui fut admis aux Etats de Béarn le 5 juin 1690 comme « seigneur de la maison noble d’Abère ». Il ne laissa pas de postérité et ses biens passèrent à un autre frère.
Jacob de Gassion, marié en 1697 avec Marie de Balsunce, mourut à Pau le 9 décembre 1708 et fut inhumé dans la chapelle de Gassion. Le tombeau avec armoiries et épitaphe de son épouse se trouve dans la chapelle St Jacques d’Asson. Ils laissèrent plusieurs enfants, qui héritèrent successivement de la maison d’Abère.
Pierre de Gassion fut admis aux Etats de Béarn comme seigneur d’Abère le 15 mai 1715. En 1719, il acheta la maison abbatiale de Bégarie, ce qui lui donnait droit au quart de la dîme d’Asson. Il mourut à Asson le 30 avril 1732 et fut inhumé dans la chapelle St Jacques : sans postérité, ses biens passèrent à sa sœur Marie Sara puis à leur sœur Magdeleine-Claire. Celle-ci mourut à Andrein en 1762, elle était veuve d’Armand de Caumia-Baillenx.
Elle laissa ses biens à son fils Jean Henry de Caumia-Baillenx, « seigneur d’Andrein, des châteaux et maison noble d’Abère d’Asson ». Il décéda le 2 juin 1793 à Pau et laissa l’héritage à son fils Jean-François de Caumia-Baillenx, qui vendit la maison d’Abère le 21 mai 1805, ainsi que toutes ses dépendances à Antoine Valérien Lescun, praticien et maire d’Asson, pour 24 000 francs.
Le 8 mai 1837, le fils d’Antoine Lescun, Jean-Donat Lescun, revendit au baron Armand-Mathieu d’Angosse le domaine d’Abère et ses dépendances, pour la somme de 46 300 francs.
Armand-Mathieu d’Angosse, descendant de la famille d’Incamps, baron de Corbères, chevalier de Malte, fut auditeur au Conseil d’Etat, sous-préfet de l’arrondissement de Pau en 1811, député des Basses Pyrénées en 1816, Pair de France en 1845. Il mourut à Corbères le 8 juin 1852.
Sa fille Louise-Charlotte-Amandine d’Angosse lui succéda. Mariée le 3 août 1830 à Pierre-Charles-Gaston, marquis de Luppé, elle décéda le 24 aôut 1859.
Leur fils Joseph Louis, comte de Luppé, leur succéda. Il fut député des Basses Pyrénées en 1877-1878 puis de 1885 à 1889. Son épouse Louise Marie Aldegonde de Rivière est décédée le 4 mai 1897 dans l’incendie du Bazar de la Charité à Paris. En souvenir, il offrit à la paroisse d’Asson le vitrail représentant Ste Aldegonde et St Louis.
C’est leur fils Gaston, Marie, Joseph, Antoine, Vicomte de Luppé, qui hérita du château et de ses dépendances. Sculpteur, il réalisa à l’identique deux magnifiques statues de bronze représentant « la France victorieuse et reconnaissante » : placées au-dessus d’un socle élevé, elles constituent les monuments aux morts d’Asson et d’Arles (Bouches du Rhône). En 1921, il fit donation à la commune d’un terrain jouxtant le cimetière, ainsi que d’une souscription pécuniaire pour y élever le monument des enfants d’Asson morts pour la France. Marié avec Anne-Marie de Cossé Brissac, femme de lettres, sous le pseudonyme de Marie Cossa, ils eurent six enfants. Aujourd’hui, le château d’Abère est propriété indivise des quatre enfants survivants.
Rédaction : association histoire et archéologie
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